Oser parler de la mort aux enfants

Elle est omniprésente en ces temps de pandémie. Comment aider un jeune à apprivoiser la mort et à vivre un deuil ?

Vécue en catimini, la mort s’est comme dématérialisée. Aujourd’hui elle s’impose à nous, rapprochée et devenue menaçante… Nous en avons peur, et voulons épargner nos enfants. Par ce que Josée Masson (1) nomme des “maladresses d’amour“, nous avons tendance à “mentir à nos jeunes, embellir la réalité, éviter leur participation, modifier les mots, prendre nos besoins pour les leurs“.

Choisir un vocabulaire juste. Précisez à l’enfant le sens du mot deuil : il ne le connaît pas et risque de croire que c’est une maladie. “Evitez, explique Laure Leslé, accompagnatrice de personnes en deuil, d’utiliser des images, comme ‘il est parti, il est au Ciel, il a disparu ou s’est endormi’. Nommez la réalité : son corps a cessé de fonctionner, son cœur de battre. Il n’a palus mal, ou froid ou peur dans son cercueil, il ne sent plus rien. Un enfant le comprend à partir de 6 ans”.

Trouver des rituels. L’idéal est que l’enfant se rende aux funérailles. En ces temps où l’on ne peut se rassembler pour un dernier adieu, l’enfant peut exprimer ce qu’il ressent par une lettre, un dessin, un poème adressé à la personne décédée.

Parler du défunt. Quelles qualités as-tu appréciées chez ton papi, quel souvenir gardes-tu de ta grand-mère, autant de manières de réaliser que la personne est morte, mais qu’elle vit encore dans notre cœur, et qu’on ne l’oubliera jamais. Aux Noëls suivants, l’évoquer : “il n’est pas là mais on pense à lui, à moi aussi il manque“. A chacun de donner ses croyances spirituelles pour permettre de prolonger le lien avec la personne décédée.

Rassurer sur les causes de la mort. Non, toutes les personnes malades ne vont pas mourir, on meurt quand on est “très très très vieux ou malade”. L’enfant qui, en colère, a pu penser “je voudrais que grand-père meure”, peut se sentir coupable à l’âge de la pensée magique ; il est important de lui redire quelle est la cause du décès et qu’il sache qu’il n’est pas coupable.

Enfin, apprivoiser la mort se fait jeune, à l’occasion du décès d’un animal de compagnie par exemple. Certains parents remplacent en cachette le poisson rouge décédé pour éviter un chagrin à leur enfant, ou au contraire minimisent sa peine : il n’y a pas à juger, juste à accueillir les émotions. Le deuil dépend du lien avec celui qui est mort, et peut se faire à la suite du décès ou des années plus tard si ça n’a pas été possible avant.